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#Santé

Direction de FOReSIGHT, le Pr Baudouin veut favoriser la transversalité

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OPTICIENS ORTHOPTISTES OPHTALMOLOGISTES
24/04/2024

En juin dernier, le Pr Christophe Baudouin a pris la succession du Pr José-Alain Sahel à la direction de l’Institut Hospitalo-Universitaire (IHU) FOReSIGHT. Six mois après sa prise de fonction, nous avons voulu revenir avec lui sur l’importance de ce type de structures, les réalisations passées et ses ambitions pour l’avenir de l’IHU. Entretien.

 

 

 

 

 

 

Pr Baudouin - FOReSIGHT

Pr Christophe Baudouin, chef de service et président de la Commission Médicale d’Etablissement de l’hôpital des Quinze-Vingts, directeur de l’Institut Hospitalo-Universitaire (IHU) FOReSIGHT. 

 

Pourriez-vous nous en dire plus sur la création et les ambitions de cet IHU ? 

FOReSIGHT est le septième IHU de France, le seul issu de la deuxième vague de labellisation qui a eu lieu en 2018. Ces structures sont l’association thématique, et si possible géographique, de grands secteurs d’activités de soin et de recherche. Le but est de favoriser le passage de la recherche fondamentale à la recherche clinique, et de la recherche clinique au soin. A ce noyau dur s’ajoutent les aspects d’enseignement, et de mise en place de bonnes pratiques de filière. Ceci permet de faire de l’IHU une sorte de phare de la médecine et de la recherche, auquel les professionnels de la même discipline peuvent se référer. C’est ce qui a dicté la création des premiers IHU en 2012, dans le cadre du Programme d’Investissements d’Avenir (PIA).Du fait de notre histoire, de notre intrication géographique et thématique, nous sommes vraiment dans la définition de ce que les autorités voulaient promouvoir à travers le PIA. L’IHU s’est construit sous l’impulsion du Professeur José Sahel, sur la base du tandem Institut de la Vision, un des meilleurs centres de recherche au monde selon des audits internationaux, qu’il a créé en 2008 et dirigé jusqu’en 2021, et hôpital des Quinze-Vingts, le plus gros centre d’ophtalmologie d’Europe. Autour de ce noyau dur s’ajoutent des partenaires : les services d’ophtalmologie de la Pitié-Salpêtrière, de l’hôpital Ambroise Paré et récemment du Kremlin Bicêtre, ainsi que des partenaires universitaires à la fondation Rothschild. Le côté transversal se traduit par le fait que la plupart des hospitalo-universitaires des Quinze-Vingts travaillent en même temps à l’Institut de la Vision. De mon côté ainsi, je suis chef de service aux Quinze-Vingts depuis 2000 et président de sa Commission Médicale (l’équivalent de directeur médical) depuis 2016. En parallèle, j’ai dirigé une équipe de l’Institut de la Vision de 2008, lors de la sa création, à 2022, quand j’ai transmis la chefferie à mon adjointe, Annabelle Reaux-Le Goazigo.
 

FOReSIGHT - GuideVue


Quels exemples de passages réussis de la recherche fondamentale à la clinique pourriez-vous citer pour FOReSIGHT ?

J’ai en tête quatre projets qui sont vraiment emblématiques de ce transfert de la recherche pure vers le soin. Le premier d’entre eux est sans aucune doute Prodigy, une thérapie génique qui vise à tester l’efficacité d’un facteur de croissance, synthétisé par les bâtonnets et nécessaire à la survie des photorécepteurs à cônes, chez les patients atteints de rétinite pigmentaire. C’est un exemple même de la réussite d’un IHU, même si la recherche fondamentale qui sous-tend cette thérapie a commencé il y a très longtemps, puisqu’elle remonte à la fin des années 90, quand l’équipe qui créera l’Institut de la Vision se constitue à Strasbourg. Il aura fallu 25 ans de recherche fondamentale pour aboutir à l’étude de sécurité d’un traitement innovant, que le premier patient a reçu au printemps dernier. Tout ça à partir de ce qui était au départ une question clinique : « pourquoi les patients qui ont une pathologie qui touche les bâtonnets finissent-ils par perdre leurs cônes pourtant épargnés par l’anomalie génétique ? ». Autre réussite, la différenciation de cellules souches issues de la peau, transformées en cellules épithéliales pigmentaires, cultivées sur membrane amniotique et greffées chez des patients, pour essayer de lutter contre l’atrophie rétinienne. Les essais ont déjà commencé. C’est un exemple de recherche purement fondamentale à la base, comment différencier des cellules rétiniennes à partir de cellules souches, et cela a abouti à des traitements innovants prometteurs chez des patients. On peut également citer tout le travail effectué sur les prothèses rétiniennes et l’optogénétique, cette technologie qui permet de rendre des cellules ganglionnaires photosensibles en y introduisant un gène qui code pour une protéine qui va s'activer lorsqu'on l'éclaire avec une lumière spécifique.

"Du fait de notre histoire, de notre intrication géographique et thématique, nous sommes vraiment dans la définition de ce que les autorités voulaient promouvoir avec les IHU."
 
 FOReSIGHT - GuideVue


Quels sont vos objectifs pour la suite de cette grande aventure ?

Mon objectif est triple. D’abord, continuer à soutenir financièrement les équipes de recherche, et peut-être plus particulièrement celles qui portent des études transversales qui ont le plus de chance d’aller chez l’homme. Mais également de créer des systèmes souples de financement pour pouvoir initier des études préliminaires innovantes. Quand vous avez une très bonne idée et que vous voulez la financer, on vous demande des résultats préliminaires, mais il faut des financements pour avoir des résultats préliminaires ! L’IHU peut être un outil pour être inducteur de projets qui ont un potentiel de développement ultérieur. Ce mécanisme existe déjà au sein de l’IHU mais je pense qu’on peut encore le développer en mettant en place des procédures un peu plus légères pour ce type de projets, tout en continuant de soutenir les projets plus aboutis, évalués par des jurys internationaux, parce qu’il faut aussi que nos équipes puissent continuer leurs efforts. Enfin, si on veut faire du transversal, je pense qu’il est bon de structurer de grandes thématiques. C’est-à-dire d’essayer de favoriser des rencontres et contacts entre des équipes parfois isolées, autour d’un thème commun. Le but de l’IHU est qu’à un moment, des personnes qui ont des compétences sur une maladie rencontrent des gens qui travaillent sur une autre maladie et découvrent que finalement ils étudient des mécanismes proches, voire semblables. Ensemble ils pourront déposer des dossiers de financement pour des projets plus ambitieux. Car une recherche qui n’est plus financée va s’arrêter, alors qu’elle peut avoir un potentiel énorme, parfois des années après.

"Si on veut faire du transversal, je pense qu'il est bon de structurer de grandes thématiques pour favoriser des rencontres et contacts autour d'un thème commun."


Quels sont ces grands thèmes que vous avez retenus ?

J’en ai listé quatre. Le premier c’est le vieillissement. Celui-ci est partout, en clinique comme en recherche. L’idée est que des chercheurs qui travaillent sur le vieillissement de la rétine peuvent se trouver des points communs avec des personnes qui travaillent sur celui du nerf optique, de la cornée… parce que finalement certains mécanismes sont communs ! Il y a plus de stress oxydant, les mécanismes de défense diminuent, il y a des phénomènes environnementaux qui s’accumulent… il y a beaucoup plus de points communs que ce que l’on peut croire entre cornée et rétine, alors que ce sont des mondes qui actuellement sont parallèles et ne se croisent guère. Le deuxième grand thème concerne tout ce qui est imagerie, biomarqueurs et IA. Grâce à l’imagerie, on a commencé à se rendre compte que les mécanismes d’inflammation au sein de la rétine et du nerf optique sont similaires, bien qu’ils impliquent des cellules et cibles différentes... Le troisième concerne l’épidémiologie et l’environnement, avec le rôle des toxiques, des perturbateurs endocriniens. Il a en effet été mis en évidence qu’il y avait plus de glaucomes chez les personnes exposées à des pesticides ! Le dernier grand thème concerne la neuro-ophtalmologie, les conséquences des affections touchant la vision sur le cerveau et celles des maladies neurodégénératives sur la vue. Ces groupes thématiques de recherche ont vocation à améliorer la connaissance mutuelle entre les partenaires de l’IHU. Mon idée est qu’il y a dans FOReSIGHT de merveilleux solistes et groupes, mais qu’à un moment, pour en faire un orchestre incontournable, il faut qu’ils se coordonnent et jouent plus souvent ensemble. Mon rôle, c’est modestement de favoriser ces interactions, à la manière d’un chef d’orchestre, au service de tous et de chacun.

Propos recueillis par Aline Aurias. 

Photo en vignette : Hôpital des Quinze-Vingts et Institut de la Vision © SU LArdhuin - Institut de la Vision

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